Trois bébés pleins de vie, trois boules d’énergie, trois petits cœurs à suivre de très près. Dès les premières semaines, les rendez-vous s’enchaînent : PMI, kiné, médecins… C’est la valse des blouses blanches ! Nés prématurément, nos triplés bénéficient d’un suivi médical renforcé, et nous faisons partie du protocole Cocoon, un accompagnement précieux pour les familles d’enfants prématurés. Ce dispositif nous permet d’avoir accès, jusqu’à leurs 10 ans, à des spécialistes si le besoin s’en fait sentir.
La prématurité, c’est un long chemin. Pas toujours semé d’embûches, mais souvent bordé de prudence.
Et nous… on en a un peu fait les frais — mais surtout, on a eu beaucoup de chance.
Un petit est né avec un trou dans le cœur, surveillé de près. Deux autres avec un espace crânien qui ne s’était pas refermé, là aussi sous observation. Une petite hernie a été opérée à quelques mois. Des séances hebdomadaires de kiné sont venues soutenir leurs postures, mises à mal par les positions comprimées dans mon ventre trop étroit pour trois. Ces séances ont évité bien des retards moteurs, notamment pour la marche.
Plus tard, l’orthophoniste est entrée en scène pour les accompagner dans la diversification alimentaire. L’ophtalmologue a détecté un petit souci à un œil chez l’un d’eux, suivi de près par l’orthoptiste. Autant dire qu’on connaît toutes les salles d’attente de la région.
Et moi dans tout ça ? Eh bien, moi aussi, j’ai eu droit à mon petit marathon médical : kiné, sage-femme, ostéo… Après plus de trois mois allongée à couver mes bébés comme une déesse de la patience, mon corps ressemblait à une friche post-apocalypse. Muscles disparus. Abdos exilés sur les côtés. Une tendinite à la main droite, une épine calcanéenne, deux canaux carpiens à opérer… et un dos qui proteste encore chaque matin.
Mais ces rendez-vous sont devenus de véritables bouffées d’oxygène. Des moments pour souffler, échanger quelques mots avec un humain adulte, sortir du huis clos du quotidien.
Parce que notre quotidien, c’est ça : une mécanique bien huilée, presque militaire. Une routine tellement rodée qu’elle rassure les petits loups… et nous étouffe un peu, nous les grands.
On rêve d’un grain de folie, d’un imprévu, d’un petit vent de travers.
L’acceptation de cette routine a été un vrai travail mental. Il m’a fallu apprivoiser cette cadence, lutter contre mon besoin d’improvisation, pour admettre qu’à ce moment-là, c’était la seule manière possible de tenir debout.
On notait tout : les biberons, les quantités bues, les heures, les selles (oui, on devient très intimes avec les détails scatologiques), la vitamine D… Impossible de se souvenir de qui avait fait quoi, dans quel ordre, avec combien de millilitres, dans un état de sommeil digne d’un zombie de série B.
La moindre info manquée pouvait avoir des conséquences, surtout pour des prémas.
Et les bains ? Ah, parlons-en des bains ! Avant d’être maman, j’imaginais un moment tendre et suspendu, les bulles flottant doucement dans l’air pendant que je chantonnais des berceuses douces…
La réalité ? On n’avait pas de baignoire, juste une petite bassine pour bébé. Donc, un bébé à la fois. Un enchaînement digne d’un fast-food bien huilé : bain, soin, change, et on recommence. Une heure plus tard, on avait l’impression d’avoir couru un semi-marathon en serviette-éponge.
On a testé toutes les techniques : un bébé par jour, les trois d’affilée, des tableaux Excel mentaux pour suivre qui était propre et qui ne l’était plus… Spoiler : ils n’ont pas été lavés tous les jours. Mais ils ont été aimés, dorlotés, embrassés jusqu’à ne plus savoir où mettre nos bras.
Quant à la diversification… je vous en parle une prochaine fois. Promis, c’est un festival aussi. 😅